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L’artillerie française n’allait pas tarder à confirmer d’une façon éclatante les affirmations du brave Breton.

Ce fut d’abord à Montebello, sous les ordres d’un des généraux les plus brillants du second Empire, le général Forez, qu’enfilant la grande rue du village remplie d’Autrichiens, les obus de la petite pièce de quatre accumulèrent, en peu d’instants, les morts sur les blessés.

Puis à Palestro, où, aidé par l’artillerie, le 3e zouaves se couvrit de gloire, se jetant sur l’ennemi avec furie, à la baïonnette, bousculant une brigade entière, et lui enlevant six pièces de canon.

Mais ce fut surtout à Magenta, que la grande portée des nouvelles pièces se révéla d’une façon éclatante ; malheureusement, il faut bien l’avouer et raconter les choses telles qu’elles sont, ce furent les troupes du Maréchal de Mac-Mahon qui firent, les premières, connaissance avec cette grande portée des pièces françaises, car elles reçurent les obus de l’artillerie du général Vinoy postée à trois kilomètres de là, à Ponte di Magenta.

Si Mahurec avait pu se douter qu’il tirait alors sur des troupes françaises, il eût fait taire immédiatement Yvonne ; mais le commandant de la batterie ayant fait grimper un canonnier au sommet d’un arbre, et ce dernier ayant aperçu de grosses masses de troupes dans la direction de Marcallo, où il ne soupçonnait pas de troupes françaises, le commandant, dis-je, avait, sans hésitation, donné l’ordre de tirer dessus à toute volée.

De leur côté, les soldats de Mac-Mahon, étonnés de recevoir des projectiles d’un côté où ils n’en attendaient pas, avaient éprouvé un moment d’hésitation dans leur marche, marche qui devait cependant décider du gain de la bataille et valoir au général, qui l’avait de lui-même ordonnée et conduite, le glorieux titre de duc de Magenta.

Ce trait vous indique de suite, mes enfants, que la bataille de ce nom fut un peu décousue ; en effet, l’Empereur, qui s’était attendu à une bataille. l’avant-veille, n’en attendait pas ce jour-là, 4 août.

De son côté, le généralissime autrichien, Gyulay, qui avait battu en retraite jusque-là, s’était arrêté sur la rive gauche du Tessin, par ordre exprès de l’Empereur d’Autriche qui voulait une bataille, mais il la livrait à contre-cœur, en homme à peu près convaincu qu’il la perdrait.

Or, sachez-le bien, mes enfants, un chef qui craint d’être battu l’est déjà plus d’à moitié.