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de Chappe, celui qui avait annoncé à la Convention, comme première dépêche, la prise de Condé sur les Autrichiens. C’était encore le télégraphe aérien d’ailleurs qui, avant de disparaître pour toujours devant le télégraphe électrique naissant, allait jeter son dernier éclat en servant à la transmission des dépêches pendant la guerre de Crimée.

À Port-Vendres où le voilier qui portait Henri Cardignac dut relâcher, il n’y avait pas encore de chemins de fer. Ce nouveau mode de locomotion, qui, en Angleterre, se développait sans arrêt depuis 1830, avait beaucoup de mal à pénétrer en France.

M. Thiers lui-même, alors ministre des Travaux publics, avait déclaré, avec beaucoup d’assurance, que les chemins de fer ne pourraient jamais relier entre elles des villes séparées par de grandes distances : tout au plus pouvaient-ils, d’après lui, servir au transport des voyageurs dans la banlieue de Paris.

Aussi n’avait-on vu fonctionner, jusqu’en 1842, que les petites lignes de Saint-Étienne à Lyon, la première construite en 1826, par Marc Séguin ; puis celle d’Alais à Beaucaire en 1833 ; celle de Paris à Saint-Germain en 1837, et les deux lignes de Paris à Versailles, rive droite et rive gauche en 1838.

Ce fut en 1842 seulement que commença la construction des grands réseaux du Nord, du Midi, de l’Est, de l’Ouest, d’Orléans et de Paris-Lyon-Méditerranée.

Sur la dernière ligne, de Marseille à Paris, les trains marchaient déjà à la vitesse de quarante kilomètres à l’heure lorsque Henri Cardignac la rejoignit à Avignon. Arrivé à Paris en trente heures, alors que le même trajet s’exécute aujourd’hui en dix heures, il sauta dans le train d’Orléans et arriva à Tours neuf jours après avoir quitté l’Afrique.

C’était le soir : il était harassé, couvert de poussière, mais il ne sentait pas la fatigue. Arrivait-il encore à temps ?

Grâce au chemin de fer, il pouvait l’espérer.

Le cœur battant à coups précipités, il se hâta vers le quartier de cavalerie, se fit reconnaître du maréchal, des logis qui commandait le poste de police et le pria d’envoyer chercher l’adjudant de semaine.

Celui-ci se présenta aussitôt.

— Le brigadier Bertigny, demanda le commandant est-il toujours en cellule ?