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— Il bat comme un vrai tapin, dit encore le caporal. Y a bien des tambours en pied qui ne battent pas comme ça !

Belle-Rose ne voulut pas demeurer en arrière de son subordonné :

— Que tu as raison, Rongeard ! dit-il… C’est un tapin !… Et je le nomme tambour en pied.

— Ah ! C’est donc un conscrit ? dit le caporal en riant.

— Oui, envoyé par le colonel !

— Ça se trouve bien, dit un des tambours ; nous n’étions que onze, nous serons douze comme tête de colonne. Comment que tu t’appelles, l’enfant ?

— Jean.

— Eh bien ! bravo, le petit tapin ! Bats dur et ferme pour la nation !
Belle-Rose.

Et ce fut au milieu des félicitations générales que Jean revint avec Belle-Rose à la cantine.

— Eh bien, père ? questionna la cantinière.

— Que j’en suis estupéfait, de mon tapin ! dit le vieux… Catherine, tu vas t’arranger pour l’habiller ; lui faut une tenue, il est tambour en pied !

— Oh ! quel bonheur ! s’écria Lison qui vint embrasser son nouvel ami ; Jean tapin !… quel bonheur !…

Et ces deux mots : Jean et tapin, énoncés par la fillette, devinrent le surnom sous lequel désormais on désigna Jean Cardignac.

Belle-Rose réclama au magasin un gilet, un habit de grenadier, des guêtres noires et un bicorne, les rapporta à sa fille qui, de suite, se mit à couper, à tailler, à découdre, pour organiser, avec cet uniforme d’homme, une tenue à la taille de l’enfant.

Au milieu de ces préparatifs, survint le colonel Bernadieu.

Satisfait, en apprenant les aptitudes de son nouveau petit tambour, il le complimenta :

— Mon garçon, lui dit-il, tu vas écrire à ton patron pour le tranquilliser ; tu lui diras que je t’ai pris sous ma protection et que je t’amènerai moi-même,