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Le sous-lieutenant Jean Cardignac y assista, car son bataillon était justement de service. C’est avec une émotion indescriptible qu’il vit, dans un rayonnement de gloire, le nouvel Empereur, maintenant maître absolu des destinées de la France, passer devant lui, entouré de ses maréchaux : Kellermann, Lefebvre, Perignon, Serurier, Jourdan, Berthier qui était en même temps ministre de la Guerre, Masséna, Lannes, Ney, Augereau, Brune, Murat, Bessieres, Moncey, Mortier, Soult, Davoust, Bernadotte.

Napoléon venait ainsi de gravir la plus haute cime que son imagination eut jamais pu rêver.

De suite, il voulut s’occuper de la descente en Angleterre.

Assurant les dispositions utiles pour le bon fonctionnement intérieur de l’Empire, il fixa son départ pour Boulogne en juillet 1804, et la Garde entière l’y devança.

Jean Tapin dut donc, pour tout de bon, faire ses adieux à ceux qu’il aimait.

Avant de partir, Napoléon avait voulu distribuer lui-même à ceux qui avaient bien servi la France, les croix de la Légion d’honneur. Cette sublime institution datait bien de 1802, mais l’organisation en avait été lente, et quelques croix seulement avaient été distribuées.

Cette grandiose cérémonie eut lieu le 14 juillet 1804, aux Invalides, et ce ne furent pas seulement des grands dignitaires, des généraux, des savants que décora Napoléon. Les humbles ne furent pas oubliés, et nos amis Belle-Rose et La Ramée montèrent aussi sur l’estrade pompeuse, pour y recevoir « l’Étoile des braves », avec l’accolade de l’Empereur. Du reste, Jean Tapin allait, lui aussi, être, au camp de Boulogne, l’objet de cette même distinction.

L’Empereur arriva en effet au camp le 26 juillet (vous voyez qu’il ne perdait pas son temps en route !) et dès le lendemain il se mettait à inspecter les divers campements, répartis depuis Étaples jusqu’à Ambleteuse.

C’est à cette époque que la Garde fut définitivement constituée, et que l’Empereur apporta de notables modifications dans l’équipement de son armée. Il supprima notamment l’ancien chapeau républicain à cornes, lequel fut remplacé, pour l’infanterie et divers corps, par le haut shako à pompon ou à plumet.

Les cuirassiers, dont plusieurs régiments portaient encore le chapeau bicorne, reçurent tous une tenue uniforme, avec le casque en acier.