Bonaparte sourit, satisfait :
— Dis-moi ton histoire, fit-il.
Rapidement, Jean Tapin conta ses aventures.
Bonaparte s’était levé. Les mains derrière le dos il circulait, tout en jetant, de temps à autre, le feu de ses yeux noirs sur le regard du jeune soldat.
Le récit terminé, il vint se planter devant le petit sergent ; et d’une voix singulièrement douce :
— Tu as bien fait de forcer ma porte : j’aime les hommes de ta trempe !… El qu’est-ce que tu as à me demander ?
Cette fois, Jean, la gorge serrée, fut incapable d’articuler un mot.
— Je le sais, moi, ce que tu veux, reprit Bonaparte en souriant. Tu veux ton épaulette.
— Oh ! mon général !…
— Tu vois que j’ai bonne mémoire… Eh bien, tu l’as !
— Oh ! merci !
— Je vais même te donner plus que cela.
— Oh !
— Tu comptes, à partir d’aujourd’hui, dans ma garde. Tu peux en faire partie, puisque tu as bien plus à ton actif de guerre, que les quatre campagnes obligatoires.
Jean ne dit rien. Il en était bien incapable, allez, mes enfants ! Mais son visage, ses yeux parlaient pour lui.
— Allons ! dit enfin Bonaparte, tu es libre ; tu recevras ton brevet sous peu. Et comme Jean ne bougeait pas, le Consul fronça légèrement le sourcil.
— Eh bien, dit-il presque durement ; car telle était sa nature, qu’il passait instantanément de la douceur à la brusquerie.
— J’ai encore quelque chose à vous demander, mon général.
— Ah !… Et c’est !
— La permission de me marier.
— Ah ! par exemple… à ton âge… tu es trop jeune.
— Mais non, mon général ! je vous assure !
Jean Tapin avait retrouvé sa langue.
Très vite, le sang au visage, il raconta la partie familiale de son histoire et il eut l’éloquence vraiment convaincante, car lorsqu’il eut fini :
— Eh bien, puisque tu as trouvé une perle pareille, marie-toi, mon