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On attendait en effet les beaux jours, pour reprendre l’action que Carnot voulait, cette fois, décisive.

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À Paris, Catherine et Lison continuaient leur existence pleine d’inquiétude, que coupaient d’un rayon de joie les lettres de Jean Cardignac.

Lisette grandissait. Toujours jolie avec sa mutine tête blonde, elle prenait du sérieux et devenait une gentille petite femme d’intérieur, sous les conseils intelligents de sa mère.

Maintenant, c’était elle et Catherine qui s’occupaient de tout dans la maison de la rue de la Huchette.

« Vraiment, c’est une chance de vous avoir rencontrées, disait souvent maîtresse Sansonneau, car vous êtes deux perles ; et moi qui n’avais pas d’enfants, j’en ai deux à présent : deux filles !

— Non, maman Sansonneau, interrompait Lison, vous n’en avez qu’une, c’est maman Catherine ; mais vous avez une petite-fille qui s’appelle Lise et un petit-fils qui s’appelle Jean.

— Tu as raison tout de même, reprenait la brave femme. Mais c’est égal, je suis bien contente ! avec deux ménagères comme vous, mon bon Sansonneau et moi, vieux comme nous sommes, nous pouvons nous reposer à présent.

Pourtant les soins de la maison et du commerce n’empêchaient point Catherine de s’occuper passionnément des événements qui se déroulaient, tant à l’extérieur qu’à Paris même.

À force de l’entendre discuter avec autant de logique que de patriotisme, maître Sansonneau, d’abord rebelle aux nouveautés de la Révolution française s’était laissé entraîner par le charme de Catherine ; et maintenant, il n’y avait pas, dans tout le quartier, un plus ferme défenseur des idées nouvelles que le vieux marchand.

Il est juste d’ajouter qu’il les eût abandonnées avec le même empressement, si l’ancien régime était revenu, car, à vrai dire, sauf en matière de commerce, il n’avait pas beaucoup de cervelle.

Cette année 1795 avait vu s’accomplir une transformation dans le gouvernement : la Convention avait remis les pouvoirs au Directoire ; il y avait eu, à ce sujet, de nouveaux complots et même des troubles dans la rue.