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il le fit avec mollesse, négociant avec eux, et dupé par le roi de Prusse qui, après s’être engagé à abandonner la coalition, oublia toutes ses promesses dès qu’il fut hors d’atteinte. Aussi, l’ennemi — tout en perdant beaucoup de monde et beaucoup de bagages — put-il néanmoins s’en tirer sans trop de mal.

L’armée de Valmy s’était, après la victoire, scindée en plusieurs tronçons. La 9e demi-brigade fut affectée au corps d’armée du général Custine qui, de suite, prit l’offensive et pénétra dans le Palatinat.

Ce fut une marche hardie, trop audacieuse même, car elle séparait cette armée du gros des forces françaises.

Mais Custine était ardent, et tous ses soldats le suivaient avec enthousiasme. C’est ainsi qu’il remonta le Rhin et prit successivement trois villes : Spire, Worms et Frankenthal.

Enfin, grisé par le succès, le général français poussa jusqu’à Mayence. Cette place se rendit à lui le 21 octobre 1792.

Jean Tapin nageait dans la joie ! Maintenant il n’aurait pas fallu lui marcher sur le pied !

Songez donc : avoir, à treize ans, assisté à plusieurs combats et à une bataille rangée ! Avoir parcouru à pied la distance de Paris à Mayence !

Cela vous baptise déjà : « vieux soldat » ; et moitié sérieux, moitié plaisants, ses camarades de la 9e donnaient parfois ce titre au petit tambour.

Aussi, quand son régiment cantonnait dans une ville conquise, Jean, le bicorne de travers, la tête haute, très fier de son uniforme, dévisageait d’un air de supériorité les gros Allemands qui, sur le seuil de leur porte, fumaient leur longue pipe de porcelaine et considéraient le gamin d’un œil étonné.

Tout allait donc au mieux de ses désirs, car Jean, ayant pris goût aux opérations de guerre, avait horreur de l’inaction. Il fut servi à souhait : la 9e demi-brigade, placée sous les ordres de Kléber, prit part à presque toutes les opérations que le général Custine entreprit dans la région.

Malheureusement, les Prussiens, que Dumouriez avait eu le tort de laisser se reformer tranquillement, voulurent reprendre l’offensive. Remontant la rive droite du Rhin, ils vinrent attaquer les Français.

Leur effort, combiné avec celui d’un corps d’Autrichiens et de Hessois qui arrivait du nord, réussit à repousser Custine. Vingt mille soldats français parmi lesquels la 9e demi-brigade, après avoir été coupés du corps prin-