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« La guerre de partisans (toujours heureuse, d’après le témoignage de l’histoire) est en contradiction directe avec cette règle.

« Cette contradiction tient à ce que la science de la guerre identifie la force d’une troupe avec son effectif. Plus on a de troupes, dit-elle, plus on est fort. Les gros bataillons ont toujours raison. »

Il est clair déjà, par ce qui a été dit plus haut, que la guerre de partisans n’est pas en contradiction avec les fondements de l’art de la guerre, puisque celui-ci admet également la concentration et la dispersion des forces, suivant le but visé et les circonstances au milieu desquelles il faut l’atteindre. En second lieu, l’auteur sait parfaitement que le gros des forces de notre armée ne s’est pas émietté en détachements de partisans, mais est resté groupé. Donc il n’y a eu dispersion que pour une partie relativement très faible de nos forces. Et à juste raison, car autrement les. Français n’auraient pas hésité un instant à s’éparpiller aussi sur plusieurs routes, et la retraite leur eût coûté infiniment moins de monde. Ce ne sont pas les détachements de partisans qui les ont obligés à rester en une seule masse, mais tout bonnement le fait que nos forces principales étaient également restées groupées. C’est précisément cela, et uniquement cela, qui a rendu si venimeuses les piqûres d’épingles de nos détachements de partisans et les a transformées en blessures mortelles.

En troisième lieu, soit dit sans éveiller les susceptibilités de l’honorable auteur, le principe d’être plus fort que l’adversaire sur le point d’attaque, non seulement n’est pas contredit par les opérations des partisans, mais au contraire trouve en elles une éclatante confirmation. Un partisan ne songe même pas à attaquer des masses ennemies tant soit peu notables et prêtes à combattre. Il cherche à ne jamais attaquer que par surprise. En d’autres termes, sa première et dominante préoccupation est précisément d’être plus fort que l’adversaire sur le point où il attaque. Si cette condition lui échappe, il s’en va, il file au plus vite, il se sauve, pour dire les choses tout crûment, ce que ne fera jamais un détachement plus considérable. On peut dire, il est vrai, que le partisan ne se renforce pas au moment de l’attaque, mais qu’il saisit au vol une minute de faiblesse de son adversaire. Le résultat n’est-il pas le même, du moment où il y a rupture d’équilibre en sa faveur. Du reste, le partisan n’a garde de