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20 CONTES ALBANAIS

put l’y maintenir ; elle pendait presque jusqu’à terre, et c’est tout au plus s’il la tenait assez haut pour l’empêcher d’être crevée par les pierres.

L’ours attendit une heure, deux heures, puis il partit du côté de la fontaine où était allé le derviche, et, l’ayant rejoint, il lui demanda pourquoi il avait tant tardé. C’est, répondit-il, que je voulais enlever le roche tout entier avec la source, car de revenir avec l’outre seulement, ce serait une honte pour moi, mais cela est très incommode à porter : toi, tu peux bien te charger au moins de l’outre. En effet, l’ours la jette sur son dos, et ils s’en reviennent tous les deux.

Chemin faisant, l’ours proposa au derviche de lutter ensemble. Va-t-en bien vite, lui répondit l’autre, tu n’es pas de force avec moi. À la fin pourtant, ils en viennent aux mains, et une fois l’ours étreignit le derviche avec tant de force, que les yeux lui sortaient de la tête et qu’il avait la face rouge comme du sang. Ce que voyant l’ours, il lui demanda ce qui le mettait en pareil état. C’est, dit-il, que je ne sais ce que je dois faire : si je te jette de ce côté, tu seras brisé en mille morceaux, si je te jette de l’autre, ce sera encore