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n’était pas encore préparé. Avec cette impatience inhérente à la nature humaine, j’agitai la sonnette et donnai sèchement l’ordre de me servir. Puis avisant sur la table une revue, je me mis à la feuilleter, tandis que mon compagnon dévorait silencieusement ses tartines. Une marque au crayon faite à l’un des articles attira mon attention, et ce fut naturellement celui-là que je me mis à parcourir tout d’abord.

Son titre Le livre de la vie me parut quelque peu prétentieux. L’auteur cherchait à faire ressortir tout le profit qu’un homme vraiment observateur pouvait retirer des événements quotidiens en les passant soigneusement au crible d’un examen judicieux et méthodique. Ce qu’il disait à ce propos me parut un mélange extraordinaire de subtilité et de niaiserie ; quelque serré qu’en fût le raisonnement, les déductions étaient tellement tirées par les cheveux qu’elles semblaient tomber complètement dans le domaine de l’exagération. L’expression surprise un instant sur un visage, la contraction d’un muscle, le clignement d’un œil, suffisaient, prétendait l’auteur, à révéler les pensées les plus secrètes d’un individu. Quiconque possédait certaines habitudes d’observation et d’analyse ne pouvait s’y tromper et devait aboutir ainsi à des conclusions aussi mathématiques que celles d’Euclide dans ses célèbres théorèmes. Enfin les résultats obtenus ainsi