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DE SHERLOCK HOLMES

faisait de lui, je l’écoutai avec le plus vif intérêt le jour où, dans la deuxième année de mon mariage, elle vint m’apprendre le triste état de santé de mon ami.

— Il se meurt, docteur Watson, me dit-elle. Il décline rapidement depuis trois jours, et je me demande s’il passera la journée. Il ne voulait pas me permettre d’aller chercher un médecin. Ce matin, quand j’ai vu que les os du visage lui crevaient la peau et qu’il me regardait avec de grandes prunelles luisantes, je n’ai pas pu y tenir. « Avec ou sans votre permission, je cours chez un médecin, lui ai-je dit. — Alors, amenez-moi Watson », a-t-il répondu. Si vous voulez le revoir, il n’y a pas une heure à perdre. »

Je fus d’autant plus impressionné que je ne le savais pas malade. J’eus vite fait d’enfiler un veston. L’instant d’après, j’étais en voiture avec Mrs. Hudson et je lui demandais quelques détails.

— Je n’ai pas grand’chose à vous raconter, monsieur, me dit-elle. Une affaire l’avait occupé ces temps-ci du côté de Rotherhithe, dans une petite rue près de la rivière ; il en a rapporté sa maladie. Il s’est mis au lit dans la journée de mercredi et n’en a pas bougé depuis.

Pendant ces trois jours, ni un aliment ni une goutte d’eau n’ont passé entre ses lèvres.

— Bon Dieu ! pourquoi n’avoir pas appelé un médecin ?

— Il me le défendait, monsieur. Vous savez s’il parle en maître : je n’ai pas osé lui désobéir. Mais il n’est plus pour longtemps de ce monde, hélas ! et vous vous en rendrez compte au premier coup d’œil.

Quel déplorable spectacle m’attendait, en effet, à mon arrivée ! C’était un triste lieu que cette chambre de malade dans la demi-clarté d’un jour brumeux de novembre ; mais quand je vis la maigre figure ravagée qui me regardait du fond des draps, j’eus froid au cœur.