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de velours, en poussant un long soupir de soulagement.

Trois fois par jour depuis bien des mois j’avais assisté à pareille opération ; mais je n’avais pu encore en prendre mon parti. Au contraire, de jour en jour ce spectacle m’irritait davantage ; chaque nuit je sentais ma conscience se révolter devant la lâcheté qui m’empêchait de protester ouvertement contre une telle manie. Bien des fois j’avais fait le serment d’apaiser mes remords en accomplissant mon devoir ; mais l’air froid, ennuyé, de mon compagnon glaçait toujours les paroles sur mes lèvres. Ses facultés extraordinaires, l’autorité que lui donnaient ses connaissances si étendues, les nombreuses preuves que j’avais eues de toutes ses qualités, tout contribuait à changer mon hésitation en inertie, tant je craignais de le contrarier.

Cependant ce jour-là, soit que je fusse encore sous l’influence du petit vin de Beaune dont j’avais arrosé mon déjeuner, soit que la manière délibérée dont il procédait m’eût particulièrement exaspéré, je me sentis incapable de me contenir davantage :

« Et qu’est-ce aujourd’hui, demandai-je, morphine ou cocaïne ? »