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Si ma mère me demandait de quoi je souffrais, ou que mon père me parlât de mettre la main au travail, je me laissais aller à répondre en termes si âpres, si amers que depuis j’en ai souvent éprouvé du chagrin.

Ah ! on peut avoir plus d’une femme, et plus d’un enfant, et plus d’un ami, mais on ne peut avoir qu’une mère.

Aussi doit-on la ménager aussi longtemps, qu’on l’a.

Un jour, comme je rentrais en tête du troupeau, je vis mon père assis, une lettre à la main.

C’était un événement fort rare chez nous, excepté quand l’agent écrivait pour le terme.

En m’approchant de lui, je vis qu’il pleurait, et je restai à ouvrir de grands yeux, car je m’étais toujours figuré que c’était là une chose impossible à un homme.

Je le voyais fort bien à présent, car il avait à travers sa joue pâlie une ride si profonde, qu’aucune larme ne pouvait la franchir.

Il fallait qu’elle glissât de côté jusqu’à son oreille, d’où elle tombait sur la feuille de papier.