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jim harrison, boxeur

la pitié et l’admiration que m’inspiraient ces deux vaillants hommes, je souhaitais avec ardeur que chaque assaut fût le dernier.

Et pourtant, à peine Jackson avait il crié : — Allez ! que tous deux s’élançaient des genoux de leurs seconds, le rire sur leurs figures abîmées et la blague sur leurs lèvres saignantes.

C’était là peut-être une humble leçon de choses, mais je vous en donne ma parole, plus d’une fois dans ma vie, je me suis contraint à accomplir une tâche pénible, en rappelant à mon souvenir cette matinée des Dunes de Crawley.

Je me suis demande si j’étais faible au point de ne pouvoir faire pour mon pays ou pour ceux que j’aimais, autant que le faisaient ces deux hommes, en vue d’un enjeu misérable et pour se conquérir de la considération parmi leurs pareils.

Un tel spectacle peut rendre plus brutaux ceux qui le sont déjà, mais j’affirme qu’il a aussi son côté intellectuel et qu’en voyant jusqu’où peut atteindre l’extrême limite de l’endurance humaine et le courage, on reçoit un enseignement qui a sa valeur propre.

Mais si le ring peut produire d’aussi brillantes qualités, il faut avoir un véritable parti pris pour nier qu’il puisse engendrer des vices terribles et le destin voulut que ce matin-là, nous eussions les deux exemples sous les yeux.

Pendant que la lutte se poursuivait et tournait contre le champion de Sir Lothian Hume, le hasard fit que mes regards se détournèrent fort souvent pour remarquer l’expression que prenait sa figure.

Je savais, en effet, avec quelle témérité il avait parié, je savais que sa fortune aussi bien que son champion s’effondraient sous les coups écrasants du vieux boxeur.