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jim harrison, boxeur

ces années passées au village, le champion Harrison me laissa entrevoir un instant quelle sorte d’homme il avait été jadis.

Par une matinée d’été le petit Jim et moi étions debout près de la porte de la forge, quand une voiture privée, avec ses quatre chevaux frais, ses cuivres bien brillants, arriva de Brighton avec un si joyeux tintamarre de grelots que le champion accourut, un fer à cheval à demi courbé dans ses pinces, pour y jeter un coup d’œil.

Un gentleman, couvert d’une houppelande blanche de cocher, un Corinthien, comme nous aurions dit en ce temps-là, conduisait et une demi-douzaine de ses amis, riant, faisant grand bruit, étaient perchés derrière lui.

Peut-être que les vastes dimensions du forgeron attirèrent son attention, peut-être fut-ce simple hasard, mais comme il passait, la lanière du fouet de vingt pieds que tenait le conducteur siffla et nous l’entendîmes cingler d’un coup sec le tablier de cuir du forgeron.

— Holà, maître, cria le forgeron en le suivant du regard, votre place n’est pas sur le siège, tant que vous ne saurez pas mieux manier un fouet.

— Qu’est-ce que c’est ? dit le conducteur en tirant sur les rênes.

— Je vous invite à faire attention, maître, ou bien il y aura un œil de moins sur la route où vous conduisez.

— Ah ! c’est comme cela que vous parlez, vous, dit le conducteur en plaçant le fouet dans la gaine et ôtant ses gants de cheval. Nous allons causer un peu, mon beau gaillard.

Les gentilshommes sportsmen de ce temps-là étaient d’excellents boxeurs pour la plupart, car c’était la