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jim harrison, boxeur

Cette mâchoire, c’était celle de l’homme privé, Charles Fox, le joueur, le libertin, l’ivrogne.

Toutefois, il n’ajouta jamais à ses vices le pire des vices, l’hypocrisie. Ses vices se voyaient aussi à découvert que ses qualités. On eût dit que, par un bizarre caprice, la nature avait réuni deux âmes dans un seul corps et que la même constitution contînt l’homme le meilleur et le plus vicieux de son siècle.

— Je suis accouru de Chertsey, Sir, rien que pour vous serrer la main et m’assurer que les Tories n’ont point fait votre conquête.

— Au diable, Charlie, vous savez que je coule à fond ou surnage avec mes amis. Je suis parti avec les Whigs. Je resterai whig.

Je crus voir sur la figure brune de Fox qu’il n’était pas convaincu jusqu’à ce point-là que le Prince fût aussi constant dans ses principes.

— Pitt est allé à vous, Sir, à ce que l’on m’a dit.

— Oui, que le diable l’emporte, je ne puis me faire à la vue de ce museau pointu qui cherche continuellement à fouiller dans mes affaires. Lui et Addington se sont remis à éplucher mes dettes. Tenez, voyez-vous, Charlie, Pitt aurait du mépris pour moi qu’il ne se conduirait pas autrement.

Je conclus, d’après le sourire qui voltigeait sur la figure expressive de Sheridan, que c’était justement ce qu’avait fait Pitt. Mais ils se jetèrent à corps perdu dans la politique, non sans varier ce plaisir par l’absorption de quelques verres de marasquin doux qu’un valet de pied leur apporta sur un plateau.

Le roi, la reine, les lords, les Communes furent tour à tour l’objet des malédictions du Prince, en dépit des excellents conseils qu’il m’avait donnés vis-à-vis de la Constitution anglaise.