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nous longeons la côte de ce que les Grenadins nommaient leur royaume du soleil ; terre ensoleillée, en effet ! car d’une haute chaîne de monts qui s’étend de Tarifa au cap de Gata, avec un déploiement de 90 lieues, descendent jusqu’à la mer des pentes très raides et qui plongent droit au midi ; c’est une succession d’âpres collines, de monts pelés, brûlés, rocheux, de ravins et de vallons, au pied desquels se trouvent Estepoña, Marbella, Malaga, Velez-Malaga, Almuñecar (sur le méridien de Grenade), Motril, Adra et Alméria ; — vers l’Est et au point le plus septentrional de la courbe extérieure du croissant que forme cette chaîne et la côte, se soulève l’énorme Névada qui domine de beaucoup sur tout le reste ; elle est si haute que du large on l’aperçoit pendant tout le parcours jusqu’à Alméria ; nous n’allons pas jusque là ; nous prenons terre à Malaga, le plus grand port de mer de l’Espagne après Barcelonne, et la plus grande ville de l’Espagne méridionale après Séville : 80,000 habitants, situation très heureuse, au débouché de la vallée du Guadalmédina, au pied d’une colline qui porte le fort du Gibralfaro, et à mi-hauteur, les ruines considérables, mais presque informes, de l’Alcazaba ou citadelle, dont la première construction remonte aux Phéniciens.

Stationnons au Gibralfaro, d’où la vue est si vaste et si belle ! très agréable encore est la vue des gracieuses malagueñas, odalisques aux petits pieds et aux grands yeux, se promenant par une fraîche soirée à l’Alameda, spacieuse promenade bien ombragée et ornée de statues, et de deux fontaines jaillissantes, l’une desquelles offre un groupe de petits personnages qui devraient bien aller exécuter leurs jets d’eau dans un water-closet, tant leur réalisme est immodeste ! — La cathédrale est digne de remarque aussi, bien que ne datant que de la Renaissance, comme le prouve son style. Malaga, depuis si longtemps riche, heureuse et prospère, et renommée surtout pour ses vins et ses raisins, se rendit aux Maures presque sans coup férir, après la désastreuse bataille de Xérès, mais opposa une résistance héroïque aux efforts de Ferdinand d’Aragon ; prise en 1487, cruellement