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les apprentis de l’armurier

— Très galant ! Cela ne vous indigne pas, ma mie ?

— J’aime encore plus Gaultier pour son attachement à votre personne, monseigneur.

— Douce sait que rien ne peut nous séparer, appuya Gaultier, ni dans la vie, ni dans la mort…, seulement ça, le plus tard possible.

 

Son vœu devait se réaliser : Guy de Dampierre mourut dans un âge avancé après avoir vécu sous cinq rois, de Philippe-Auguste à Philippe IV.

Cette longue existence fut-elle heureuse ?

En lui promettant la grandeur, Madja avait réservé le bonheur à son jovial compagnon, et la couronne de feuillage du roi de Victoire avait moins d’épines que la couronne d’or du comte de Flandre.

La fin surtout du règne de Guy, devenu comte de Flandre, fut féconde en malheurs.

Une première fois prisonnier du roi de France qui ne s’appelait plus saint Louis, mais Philippe IV, il fut retenu pendant six mois dans cette tour du Louvre où jadis avait été enfermé son oncle Ferrand.

Plus tard encore, trahi par la fortune, vaincu à Furne et à Cassel, abandonné de ses alliés, le vieillard accablé par l’âge et l’adversité, se résigna, malgré les conseils de son fidèle écuyer Gaultier, à implorer la générosité de son suzerain.

Hélas ! depuis le temps où ils cheminaient allègrement sur la route de Provence, ni l’un ni l’autre n’avaient changé.

Les ans et les soucis avaient ridé le front du comte et blanchi ses cheveux ; mais, sous le manteau du vieux gentilhomme comme sous la veste de l’apprenti, Guy de Dam-