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les apprentis de l’armurier

Tout à coup, un double cri s’échappa des lèvres des deux jeunes garçons.

— Guy !

— Gaultier !

Ils tombèrent dans les bras l’un de l’autre au moment où Hugonet apparaissait, une manne de victuailles sur la tête, et contemplait ce spectacle d’un air piteux et ahuri.

En revoyant son ami, le voile qui couvrait l’esprit de Gaultier s’était brusquement déchiré, la mémoire lui était revenue, et, s’inclinant devant son maître :

— Sans le savoir, et sans le vouloir, j’usurpais votre place, mon cher sire, lui dit-il ; pardonnez-le-moi, et vous, madame, ne m’en veuillez pas, je vous prie ; la tromperie était involontaire de ma part au moins, ajouta-t-il avec un regard de reproche à Madja.

— De la mienne aussi, déclara simplement celle-ci ; vous vous étiez nommé vous-même Guy de Dampierre et j’ignorais que ce fut un subterfuge.

— C’est juste. Encore une fois excusez-moi, madame, pour l’amour de votre fils… le vrai.

La douairière ne répondit pas ; elle semblait confondue, et considérait, en hochant la tête, le véritable héritier des sires de Dampierre et des comtes de Flandre.

Était-ce possible ?

Son malaise et son irritation se traduisaient malgré elle dans son abord glacial et son air méprisant.

Son petit-fils semblait s’en amuser prodigieusement, et, tandis que sa mère saluait respectueusement la vieille dame :

— Par tous les Saints ! ma vénérable grand’mère ne semble pas charmée de la substitution ! dit-il à son ami en riant.

Et Hugonet ?

Son odyssée était plus lamentable encore.