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PENSÉES ET FRAGMENTS.

Elle a l’air de gouverner l’écrivain et de le mener à l’erreur.

C’est à propos de M. de Chateaubriand surtout, qu’on pourrait faire une étude sur la déclamation. Ceux qui n’aiment point cet écrivain et son brillant langage, ont tort et raison. La plupart, cependant, ne l’aiment point par pauvreté d’imagination, mais il se pourrait qu’on ne l’aimât pas par force de sentiment du vrai beau et de la grande simplicité. Le coloris vif et savant prodigué sur tout, n’accuse-t-il pas que l’au : teur a plutôt un parti pris d’être ému qu’il n’est ému réellement ? La vraie lumière, la lumière du jour, a des conditions de décroissance et d’ombres qu’on ne retrouve pas dans une illumination ; les ombres sont plus tranchées. C’est peut-être une image assez sen- sible de la différence entre les belles pages d’un Bos — suet, d’un Virgile, d’un Homère, d’un Milton et les pages brillantes de J.-J. Rousseau, de Lucain, de M. de Chateaubriand. Un reproche qui va plus loin et qui peut s’adresser à ces grands coloristes par état, c’est que le dessein d’éblouir le plus souvent possible donne aux idées et aux sentiments un degré de vi- vacité et de relief qui n’est pas selon la nature. Un