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J’aime à lui affirmer, d’autre part, que mes trois chapitres ont pourtant été travaillés, pris et repris, plus que tout autre travail que j’ai pu faire jusqu’à ce jour, le tout mentalement. Chaque paragraphe, a été fait et refait, jusqu’à ce que, j’oserais dire, rien ne paraisse, tant j’ai cherché à me plier au sens vrai que je découvrais, ou croyais découvrir, dans la manière de vivre et de voir le jour de ces trois illettrés à figure bien canadienne, mais de classe pauvre tout à fait. Il en reste encore de leur trempe, et de leur idéal, quoique à des degrés de compréhension moins prononcée, peut-être. Et comme ce sont les images qui sont restées dans ma pensée, il serait ingrat et malhonnête de ma part de les déplacer avec des mots appliqués ou qui paraîtraient appliqués ; n’empêche, je le répète, que j’ai refait, ou plutôt défait, plusieurs fois ces pages pour arriver à la phrase simple que je trouve convenable ici.

Ces types de campagnards tendent à disparaître : les communications amèneront naturellement des transformations dans les manières de voir et de juger les faits et les choses, les angles s’adoucissent d’un côté, et de l’autre on s’habitue aux rugosités des tempéraments étranges et non tout à fait normaux, à l’évolution des sociétés qui passent, se formant et se déformant, je puis dire.

J’ai été bien aise de mettre en épigraphe la phrase de Montaigne citant Socrate sur l’idée que celui-ci se faisait des richesses, étant donné que mes types décrits dans ce livre se sont con-