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trompe, il lisait un livre, c’était ce livre curieux dont les pages étaient certainement mal reliées, ce livre consistant, je vous l’ai dit, en un tas de pierres accumulées au bout de son champ, il le lisait tous les dimanches de l’été, lorsqu’il faisait beau soleil. Son livre était plus beau que le mien. Il avait cet avantage d’être inédit : comme Rondeau ne voulait pas s’amuser à lire des chapitres de cailloux, Durand amenait parfois avec lui mon grand’père à sa leçon. Mon grand’père le rudoyait en paroles. Durand était toujours poli, et tous deux s’aimaient comme il faut, entre voisins.

Je veux être franc : monsieur Louis Durand avait autant, sinon plus, de plaisir à ne rien faire qu’à travailler ; aussi son bonheur était-il parfait, lorsqu’il avait de la farine dans son grenier, un peu de lard dans la cave et un peu de bois à sa porte. Alors le vent pouvait souffler, la tempête mugir, lui et sa femme n’avaient plus d’in-