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Ie pren, la courſe, à vol il me deuance :
Ie fuy ſans ceſſe, il me ſuit ſans repos :
Ie fEt iamais qu’au cœur ne me lance,
Ie fQuoy que ie luy tourne le dos.
Sur mon cueur donc ſans ceſſe pleut & grelle
Du fer pointu. C’eſt grand cas toutefois,
DuEncor vit ce cors poure & fraile
DuQui mort deut eſtre mille fois.
Car ceſt archer dans l’Hydre Lernienne
Ne va pas querre vn pront venin mortel,
NeMais, dans la forge Lemnienne,
NeBeaucoup pis, vn feu immortel.
L’eſpert boiteus qui ſon pere ſe cuide
Luy bat des fers dont le coup porte feu,
LuEt d’eſprit tout ſoudain, nous vide,
LuMais n’occit, las, que peu à peu.
Or ie m’arreſte : il vault mieus me ſubmettre,
Ie veus l’atendre, & plus ne reculer.
Ie Car ce feu moins ardra peut-eſtre,
Ie Le laiſſant à ſon gré bruler.
Torches ainſi, plus de branle on leur donne,
Plus ardent fort : & ſe voit meint flambeau,
PlSans eſtre touché de perſonne,
PlS’en aller éteignant tout beau.
Vn ieune beuf, ſ’il reſtiue & ne vueille
Du neuf collier, plus eſt batu beaucoup
DuQu’vn aprenti de bonne vueille,
DuEt qui tire du premier coup.