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H. DE SALTREY.

naient plaisir à se visiter ; des chœurs chantaient les louanges de Dieu ; certains vêtements étaient d’or ; d’autres, verts, pourpres, bleus, blancs ; les rois avaient des palmes d’or à la main et des couronnes sur la tête ; il n’y avait en ce pays ni froid, ni rien qui pût faire du mal. Les pontifes dirent à Owen que c’était là le Paradis terrestre, d’où Adam avait été chassé à cause de sa désobéissance. Lorsque les pécheurs ont passé par les tourments et sont délivrés de leurs péchés par les mérites de Jésus-Christ, c’est dans ce lieu de repos qu’ils viennent demeurer, avant de monter partager l’allégresse des saints. Après ces explications, les évêques conduisirent Owen sur une montagne et le firent regarder en haut. Il vit comme de l’or en fusion. « C’est là », dirent-ils, « qu’est la porte du Paradis, c’est par là qu’entrent ceux d’entre nous qui sont élevés au ciel. Dieu nous nourrit chaque jour du mets céleste ». Et comme ils finissaient de parler, il descendit du ciel comme une flamme qui couvrit tout le pays, et, se divisant par rayons, descendit sur chaque tête et sembla y pénétrer tout entière. Elle atteignit Owen et il sentit une telle douceur dans son cœur et dans ses membres qu’il ne savait s’il était vivant ou mort. Mais cette heure passa vite. « Voilà la nourriture », dirent les évêques, « que Dieu nous donne une fois par jour ». Puis ils pressèrent Owen de retourner par la route qu’il avait prise et de mener désormais une vie sainte et sans tache. Mais lui, effrayé, suppliait les pontifes de ne pas le forcer à quitter une si grande béatitude pour retourner aux misères du monde. « C’est l’ordre de Dieu », répondirent-ils, « Lui seul sait ce qui convient à chacun ». Et, bon gré mal gré, triste, mais intrépide, Owen repartit par le chemin qu’il avait déjà suivi.

Sur sa route, les démons qui essayaient de l’effrayer s’évanouissaient dans l’air à son aspect. Quand il fut à la salle où les mauvais esprits l’avaient attaqué pour la première fois, les quinze hommes lui apparurent, louèrent Dieu et félicitèrent Owen de sa victoire ; ils lui annoncèrent qu’il était pur de tout péché et le pressèrent de se rendre le plus tôt possible à l’entrée, de peur que le prieur ne le trouvât pas et refermât la porte. Owen, après avoir reçu leur bénédiction, reprit son ascension, et au moment même où le prieur ouvrait la porte, le soldat apparut ; on le conduisit avec de grands transports de joie dans l’église et il y resta en prières pendant quinze jours. Au bout de ce temps, il reçut sur l’épaule le signe de la croix et partit pour le tombeau du Christ à Jérusalem. Revenu de pèlerinage, il alla demander conseil au roi Etienne, désireux qu’il était de passer le reste de sa vie dans les ordres saints et de combattre pour le Roi des Rois. Or, à ce moment,