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petite fille, il me regarda et rougit jusqu’aux oreilles. Je ne comprenais pas ; debout en face de lui, je le considérais avec de grands yeux étonnés. Il se redressa, s’approcha de moi d’un air embarrassé et, en proie à une agitation extrême, se mit à balbutier quelques paroles incohérentes ; il semblait s’excuser, peut-être, de n’avoir pas remarqué plus tôt que j’étais déjà une jeune fille. À la fin, je compris. Je ne me rappelle pas ce qui se produisit alors en moi ; — troublée, interdite, je rougis encore plus que Pokrovsky, et, couvrant mon visage de mes mains, je m’élançai hors de la chambre.

Je ne savais que faire, où me cacher, tant j’étais honteuse. Déjà cela seul qu’il m’avait trouvée chez lui ! Pendant trois jours il me fut impossible de supporter sa vue. Je rougissais jusqu’à avoir les larmes aux yeux. Des idées terribles, des idées ridicules s’agitaient dans ma tête. Une d’elles, la plus extravagante, était celle-ci : je voulais me rendre chez Pokrovsky, m’expliquer avec lui, tout lui avouer, tout lui raconter franchement et l’assurer que je n’avais pas agi comme une imbécile fillette, mais dans une bonne intention. J’étais parfaitement décidée à cette démarche ; grâce à Dieu,