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On vous dérange, on vous trouble ; vous êtes à l’étroit, mal à l’aise. Vous aimez la solitude, et là que n’y a-t-il pas autour de vous ? Et vous pourriez vous loger beaucoup mieux, étant donné votre traitement. Fédora dit qu’autrefois vous viviez infiniment mieux qu’à présent. Se peut-il que vous passiez ainsi toute votre vie dans l’isolement, dans les privations, sans joie, sans une cordiale parole d’ami, installé dans un coin chez des étrangers ? Ah ! bon ami, que je vous plains ! Ménagez, du moins, votre santé, Makar Alexéiévitch ! Vous dites que vos yeux s’affaiblissent ; en bien, n’écrivez plus à la lumière. Pourquoi écrire ? Sans doute votre zèle pour le service est déjà assez connu de vos chefs sans cela.

Je vous en supplie encore une fois, ne dépensez pas tant d’argent pour moi. Je sais que vous m’aimez, mais vous non plus n’êtes pas riche… Aujourd’hui, moi aussi j’étais gaie en me levant. Je me sentais si heureuse ; depuis longtemps déjà Fédora avait de l’ouvrage, et elle m’en a procuré. J’en ai été si contente, je ne suis sortie que pour aller acheter de la soie ; ensuite je me suis mise à travailler. Pendant toute la matinée j’ai eu l’âme si légère, j’ai été