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parler de bonheur ici ? Du moins, je ne trouve pas d’autre issue pour moi, mon inappréciable ami. Que voulez-vous que je fasse ? Le travail a détruit ma santé ; je ne puis pas travailler d’une façon suivie. Entrer en condition ? — L’ennui de cette existence me tuerait ; d’ailleurs, je ne conviens à personne. Je suis d’une constitution maladive, par conséquent je serai toujours à charge aux autres. Sans doute la position que j’accepte n’est pas le paradis, mais que faire, mon ami, que faire ? Est-ce que j’ai le choix ? Je ne vous ai pas consulté. J’ai voulu ne prendre conseil que de moi-même. La résolution que vous venez de lire est irrévocable, et je vais la faire connaître immédiatement à Buikoff, qui d’ailleurs me presse de lui donner une réponse définitive. Il dit qu’il est obligé de partir, que ses affaires n’attendent pas, qu’on ne peut pas les ajourner pour des bagatelles. Dieu sait si je serai heureuse ; mon sort est entre ses mains et sa sainte volonté est insondable, mais mon parti est pris. On dit que Buikoff est un homme bon : il m’estimera ; peut-être que moi aussi je l’estimerai. Qu’attendre de plus de notre mariage ?