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perdaient la jeunesse inexpérimentée, mais qu’il désirait vivement obtenir de moi une réponse favorable ; qu’enfin, dans le cas contraire, il se verrait forcé d’épouser une marchande de Moscou, attendu qu’il s’était juré de déshériter son vaurien de neveu. Il laissa malgré moi cinq cents roubles sur mon métier à broder, en disant que c’était pour acheter des bonbons ; il me promit qu’à la campagne je deviendrais grasse comme un beignet, et que je serais chez lui comme un coq en pâte. « À présent », acheva-t-il, « je suis terriblement occupé, j’ai des affaires qui me font trotter toute la journée, et je suis venu vous voir entre deux courses. » Là-dessus, il me quitta. J’ai longtemps réfléchi, mon ami, j’ai changé d’idée plus d’une fois, je me suis tourmenté l’esprit sur la question, à la fin je me suis décidée. Mon ami, je vais l’épouser, je dois agréer sa demande. Si quelqu’un peut effacer ma honte, me rendre un nom honorable, écarter de moi la pauvreté, les privations, le malheur, — eh bien, ce n’est que lui. Qu’ai-je donc à attendre de l’avenir ? Que puis-je encore demander à la destinée ? Fédora dit qu’il ne faut pas laisser échapper son bonheur ; elle dit... mais comment peut-on