Page:Dostoïevsky - L’Esprit souterrain, trad. Halpérine et Morice, 1886.djvu/93

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Je frémis, mes dents claquent. Pourtant je vais ouvrir la porte, je le laisse entrer dans la maison, et seulement sur le seuil, réunissant mes forces, je lui dis :

— Prends donc tes diamants et ne me fais plus de cadeau… Et je lui jetai la boîte.

Ici Catherine s’arrêta pour reprendre haleine. Elle frissonnait comme une feuille. Le sang lui montait au visage, ses yeux étincelaient à travers ses larmes, et une respiration sifflante soulevait sa poitrine. Puis elle pâlit de nouveau et reprit d’une voix basse, tremblante, triste, inquiète :

— Alors je suis restée seule. Il me semblait que l’orage m’enserrait de toutes parts. Tout à coup un cri retentit, puis un bruit de pas précipités dans la cour, et j’entendis cette clameur : La fabrique est en feu !… Je me blottis dans un coin. Tout le monde partit. Il ne restait dans notre maison que ma mère et moi, et je savais qu’elle était mourante. Depuis trois jours elle ne quittait plus le lit où elle devait mourir. Et je le savais, fille maudite !… Un nouveau cri… au-dessous de ma chambre… un cri faible comme celui d’un enfant qui rêve… puis le silence. J’éteins ma bougie,