Page:Dostoïevsky - L’Esprit souterrain, trad. Halpérine et Morice, 1886.djvu/78

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Ma joie !…

Il ne savait quel mot dire, il tremblait de voir son bonheur se dissiper en fumée ; il se croyait le jouet d’une hallucination, tout se troublait devant ses yeux.

— Ma reine !… Je ne puis te comprendre, je ne sais plus ce que tu viens de me dire, mes idées se perdent, mon cœur me fait mal…

Sa voix s’éteignit. Catherine se serra plus près de lui. Il se leva, et, accablé, brisé, épuisé, il tomba à genoux. Sa poitrine était soulevée par les sanglots, et sa voix, sortant droit de son cœur, tremblait comme une corde de violon, de toute la plénitude d’un transport inconnu, d’un transport et d’un bonheur inconnus !

— Qui es-tu, ma chérie ? D’où viens-tu, ma colombe ? Disait-il en s’efforçant de retenir ses sanglots. De quel ciel as-tu volé dans le mien ? Il me semble vivre dans un songe, je ne puis croire à ton être… Mais ne me fais pas de reproches, laisse-moi parler, laisse-moi tout te dire, tout… Il y a longtemps que je voulais te parler !… Qui es-tu, qui es-tu, ma joie ?… Comment as-tu trouvé le chemin de mon cœur ? Y a-t-il longtemps