Page:Dostoïevsky - L’Esprit souterrain, trad. Halpérine et Morice, 1886.djvu/73

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— Je ne sais pas ! Dit-elle enfin, suffoquée par les larmes, je ne sais pas, répéta-t-elle d’une voix à peine intelligible. Je ne me rappelle pas comment je suis entrée chez toi… – Et elle se blottit plus étroitement encore contre lui, et comme contrainte par une influence irrésistible, elle lui baisa les épaules, les mains et la poitrine, puis, terrassée par le désespoir, elle se laissa tomber à genoux, couvrit son visage de ses mains et appuya sa tête sur les genoux du jeune homme.

Il se hâta de la relever, la fit asseoir auprès de lui ; mais le visage de la jeune fille restait comme inondé de honte, et, des yeux, elle suppliait Ordinov de ne pas la regarder ; un sourire pénible effleurait ses lèvres, elle semblait au moment de succomber à une nouvelle crise de désespoir. Ses terreurs revenaient, maintenant elle écartait Ordinov avec méfiance, évitait son regard et à toutes ses questions ne répondait qu’à mi-voix, la tête baissée.

— Tu as eu un cauchemar peut-être ? Lui demandait Ordinov, tu as rêvé ?… Ou bien lui, lui, n’est-ce pas ? T’aura fait peur… Il a le délire ? Il est sans connaissance ? Peut-être aura-t-il dit des