Page:Dostoïevsky - L’Esprit souterrain, trad. Halpérine et Morice, 1886.djvu/69

Cette page n’a pas encore été corrigée

Ordinov se sentait une telle fatigue, une telle détente morale et physique qu’il pouvait à peine se traîner. Il eut du mal à parvenir jusqu’à sa maison. Sur le seuil de la porte cochère il rencontra encore le dvornik, qui avait attentivement observé les adieux d’Ordinov et d’Yaroslav Iliitch. D’assez loin encore le Tartare fit au jeune homme un signe comme pour l’inviter à venir lui parler. Mais Ordinov passa sans le regarder.

Dans l’escalier il se heurta assez rudement contre une petite figure grise qui sortait de chez Mourine les yeux baissés.

— Que Dieu me pardonne mes péchés ! Dit tout bas la petite figure en s’aplatissant contre le mur avec l’élasticité d’un bouchon.

— Ne vous ai-je point fait mal ?

— Non, je vous remercie humblement pour votre attention… Ô mon Dieu ! ô mon Dieu !…

Et le petit homme, tout en toussotant et en soupirant, et en murmurant des patenôtres, acheva de descendre avec précaution. C’était le propriétaire que le dvornik semblait tant redouter. Alors seulement Ordinov se rappela l’avoir déjà vu, lors de son emménagement, chez Mourine. Il se