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Il me regarda tranquillement pendant une demi-minute, puis il se retourna de nouveau.

― Halte ! hurlai-je en courant à lui. Ne bouge pas, tiens-toi là, et réponds-moi ! Qu’es-tu venu faire ici ?

― Si vous avez quelque chose à m’ordonner… ? ― dit-il doucement et posément après un silence, tout en suçant ses lèvres et en balançant tranquillement sa tête d’une épaule sur l’autre. Et sa voix, son attitude, tout en lui exprimait une placidité qui m’affolait.

― Ce n’est pas cela, bourreau ! Ce n’est pas ce que je te demande ! m’écriai-je tremblant de colère. ― Je vais te dire moi-même, bourreau, pourquoi tu viens ici. Tu vois que je ne te donne pas tes gages, tu ne veux pas, par vanité, condescendre à me les demander, et c’est pourquoi tu viens, avec tes regards bêtes, me punir, me torturer, et tu ne soup-çon-nes-pas, -bour-reau, comme c’est bête, bête, bête, bête, bête !…

Il recommençait déjà à tourner sur ses talons, mais je le saisis par le bras.

― Écoute : voici l’argent, tu le vois ? il est là (je tirai la somme de mon tiroir), les sept roubles