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Si cela ne suffisait pas pour me réduire, si j’osais continuer ma révolte, il se mettait alors à soupirer en me regardant, à soupirer longuement, profondément, comme s’il voulait mesurer de ses soupirs toute la profondeur de ma chute morale. Il va sans dire qu’il finissait par me vaincre. J’étais hors de moi, j’écumais de rage, et je n’en passais pas moins par où il voulait.

Mais cette fois dès le « regard sévère » je sortis de mes gonds, je me précipitai sur Apollon. ― (J’étais déjà assez irrité sans cela !)

― Halte ! lui criai-je, reste ici !

Mais lui, lentement, silencieusement, dignement, s’en allait déjà, sa main derrière son dos.

― Reviens ici ! Reviens ! criai-je en le poursuivant.

Ma voix, devait atteindre un diapason surnaturel, car Apollon se retourna et même se mit à me considérer avec un certain étonnement. Mais il s’obstinait à se taire, et c’est cela surtout qui m’exaspérait.

― Comment oses-tu entrer chez moi sans rien demander ? Comment oses-tu me regarder ainsi ? Réponds !