Page:Dostoïevsky - L’Esprit souterrain, trad. Halpérine et Morice, 1886.djvu/174

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Sur son lit de mort, il se rappellera encore, avec les intérêts accumulés et… Mais c’est précisément en ce dernier désespoir, en cette foi boiteuse, en ce conscient ensevelissement de quarante ans dans le souterrain, en ce poison des désirs inassouvis, en cette turbulence fiévreuse des décisions prises pour l’éternité et en un moment révisées que consiste l’essence de ce plaisir étrange dont je parlais. Il est si subtil et parfois si difficile à soumettre aux analyses de la conscience que les gens tant soit peu bornés ou même tout simplement en possession d’un système nerveux en bon état n’y comprendront rien. Peut-être, ajoutez-vous en souriant, ceux aussi qui n’ont jamais reçu de soufflet n’y comprendront rien, voulant me faire par là poliment entendre que j’ai dû faire l’expérience du soufflet, et que, par conséquent, j’en parle en connaisseur : je gage que c’est là votre pensée. Mais tranquillisez-vous, messieurs, je n’ai pas fait cette expérience, ― quoiqu’il me soit bien égal que vous ayez de moi telle ou telle autre opinion. Je regrette bien plutôt de n’avoir pas moi-même donné assez de soufflets… Mais suffit, assez sur ce thème qui vous intéresse trop.