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pleine de magasins de farines et d’auberges, et qui aboutissait aux remparts de la ville. De là, il tourna dans une ruelle étroite et longue, bordée de hautes barrières ; au bout se dressait le grand mur sombre d’une maison de quatre étages dont l’allée communiquait de cette ruelle à une autre. Ils approchaient tous trois de la maison, quand le vieillard se retourna et dévisagea Ordinov avec impatience. Le jeune homme s’arrêta, comme cloué sur place ; son entraînement lui parut à lui-même inconvenant. Le vieillard se retourna une fois encore, sans doute pour se convaincre que sa menace silencieuse avait produit son effet, puis, avec la jeune femme, pénétra dans la cour de la maison. Ordinov reprit le chemin de son logement.

Il était de très-mauvaise humeur et se reprochait cette fatigante journée, gaspillée sans profit et qu’il avait terminée par une sottise, en prêtant à une circonstance plus que banale les couleurs d’une aventure.

Malgré le mécontentement que lui avait causé, le matin de ce même jour, la constatation de sa sauvagerie, son esprit conservait l’habitude de