Page:Dostoïevsky - L’Esprit souterrain, trad. Halpérine et Morice, 1886.djvu/167

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Je parie que vous me trouvez prétentieux pour avoir osé écrire cela, pour avoir osé railler les hommes d’action, prétentieux et d’un goût médiocre : je fais du bruit avec mon sabre, comme le petit officier. Mais quoi ? se vante-t-on de sa propre maladie ? y a-t-il à cela la moindre arrogance ?…

Qu’est-ce que je dis ? Tout le monde en est là, et c’est toujours de ses maladies qu’on se vante. Peut-être seulement le fais-je plus que les autres. J’en conviens donc, mon objection était stupide. Il n’en est pas moins vrai que non-seulement un excès de conscience est maladif, mais que la conscience elle-même, en soi et en principe, est une maladie, je le soutiens… Laissons cela de côté pour l’instant.

Dites-moi : comment se pouvait-il faire que, juste aux heures (oui, juste à ces heures-là !) où je concevais le plus précisément toutes les délicatesses « du Beau et du Grand », comme on disait jadis, il m’arrivât, non plus de projeter, mais d’accomplir des actions si viles, si viles que… ? Plus j’approfondissais le Bien et « le Beau et le Grand », plus je m’enfonçais dans ma fange et plus j’étais tenté de m’y perdre tout à fait. Mais le point