royaume : il viendra se cacher dans votre bottine… Oui, il se fera assez petit pour cela. Donnez-lui la liberté, il se forgera lui-même de nouvelles chaînes. La liberté n’est pas faite pour les cœurs faibles… Je vous dis tout cela parce que vous êtes si jeune ! Qui êtes-vous pour moi ? Venu, parti, vous ou un autre, que m’importe ? Dès le premier jour j’ai su comment tout cela allait se passer. Mais la contredire, je ne le devais pas : il ne faut pas risquer un seul mot de travers si l’on tient à son bonheur. Pourtant, barine, tout cela se dit, continua Mourine, en train de philosopher, – mais que fait-on ? Vous le savez vous-même, dans un moment de colère on prend un poignard ! Ou encore, on attaque son ennemi dans son sommeil et on lui déchire la gorge avec les dents ! Mais si alors on te mettait le poignard entre les mains et si ton ennemi t’ouvrait de lui-même sa poitrine, va ! Tu reculerais !…
Ils entraient dans la cour ; le Tartare aperçut de loin Mourine et ôta sa casquette tout en regardant malicieusement Ordinov.
— Ta mère est-elle chez moi ? Lui cria Mourine.
— Oui.