ma patronne et moi, nous serions bien aises de laisser les choses continuer ainsi. Nous n’aurions pas soufflé mot… Mais ma vie, barine, vous savez ce qu’elle est, vous en avez vu quelque chose. Et pourtant, ce que nous demandons avant tout à la volonté sainte, c’est de nous conserver notre vie. Jugez-en vous-même, barine. Faut-il vous prier en pleurant ? Que faut-il faire ?
Ici, Mourine se caressa de nouveau la barbe.
Ordinov se sentait mal à l’aise.
— Oui, oui, je vous l’avais dit moi-même. Il est malade. C’est le malheur… C’est-à-dire… je voulais m’exprimer en français, mais excusez-moi, je ne suis pas très-habile… C’est-à-dire…
— Oui…
— C’est-à-dire oui…
Ordinov et Yaroslav Iliitch se saluèrent l’un et l’autre, un peu de côté, sans se lever ; puis tous deux, pour couvrir leur maladresse, se mirent à rire. Le grave Yaroslav reprit le premier sa présence d’esprit.
— J’ai, du reste, demandé des détails à cet honnête homme, poursuivit-il, et il m’a dit que la maladie de cette femme…