fort indélicat de continuer à sucer sa pipe en un pareil moment, et de négliger son visiteur : et pourtant, — si grand était son trouble ! Il suçait toujours sa pipe, et il la suçait de toutes ses forces, comme si il y eût cherché une inspiration.
Ordinov entra enfin dans la chambre. Il jeta à Mourine un regard aussitôt détourné. Quelque chose qui rappelait le mauvais rire de la veille parcourut le visage du vieillard. Ordinov tressaillit. Mais immédiatement la physionomie de Mourine perdit toute expression hostile et redevint impénétrable. Il salua très-bas son locataire.
Cette scène muette permit à Ordinov de se ressaisir lui-même, et, cherchant à se rendre compte de la situation, il regarda fixement Yaroslav Iliitch. Mais Yaroslav Iliitch n’avait pas encore recouvré son sang-froid.
— Entrez donc, entrez, dit-il, mon précieux ami Vassili Mikhaïlovitch. Éclairez de votre présence, marquez de votre sceau… tous ces objets vulgaires. — Et montrant de la main un coin de la chambre, il devint rouge comme un coquelicot, honteux de s’embrouiller ainsi, fâché d’avoir dépensé en pure perte une de ses plus nobles