Page:Dostoïevsky - L’Esprit souterrain, trad. Halpérine et Morice, 1886.djvu/116

Cette page n’a pas encore été corrigée

Et, chose étrange, il n’avait pas le désir de s’éveiller.

Catherine ôta le vieux tapis, ouvrit un coffre, y prit un tapis précieux tout brodé de soie écarlate et or, et en couvrit la table. Puis, d’un antique nécessaire de voyage en argent, elle sortit trois gobelets du même métal, et, d’un regard solennel et presque rêveur, elle invita le vieillard et l’hôte.

— Qui de nous, dit-elle, n’a pas les sympathies des autres ? En tout cas, il a la mienne, et boira avec moi, car vous me plaisez tous deux, vous êtes tous deux mes frères. Buvons donc à tous pour l’amour et pour la concorde.

— Oui, dit le vieillard d’une voix émue, buvons et noyons dans le vin les pensées noires ! Verse, Catherine.

— Et toi, ordonnes-tu de verser ? Demanda Catherine à Ordinov.

Il tendit silencieusement son gobelet.

— Un instant !… Que celui de nous qui a, à cette minute même, un désir, le voie réalisé ! Dit le vieillard en levant la main.

Ils trinquèrent et burent.

— À nous deux maintenant, vieillesse ! – dit