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te servir. Éteins ta haine dans ton amour, si le ressentiment de l’offense habite encore ton cœur. Dis une bonne parole.

Ordinov suivit Catherine. Il comprenait à peine qu’il allait chez le logeur. La porte s’ouvrit devant lui, et clair comme le soleil lui apparut le sourire de sa merveilleuse logeuse. Il ne vit, il n’entendit qu’elle, et son cœur déborda de joie.

— Il y a deux aubes de passées depuis que nous nous sommes vus, dit-elle en lui tendant la main. La deuxième soirée s’achève, regarde le ciel. Ce sont les deux aubes de l’âme d’une jeune fille, – ajouta-t-elle en riant, – celle qui fait rougir de la première honte son visage, quand son âme seulette parle pour la première fois, et la seconde, l’aube brûlante qui fait monter à son front son sang vermeil. Viens chez nous, viens, bon garçon. Pourquoi rester sur le seuil ? Honneur et amour à toi ! Reçois le salut du patron.

Avec un rire musical, elle prit Ordinov par la main et le fit entrer.

Il baissa les yeux, craignant de la regarder. Il sentait qu’elle était si merveilleusement belle qu’il ne pourrait supporter sa vue. Et jamais, en