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PRÉCOCES

est-ce que la roue couperait la tête de l’oie, oui ou non ? » — Certainement qu’elle la couperait, et là-dessus le moujik ouvre sa bouche toute grande et ne se tient pas de joie. — « Alors, essayons, mon ami. » — « Allons », me répond-il.

Cela ne fut pas long : il tira seulement un peu la bride, tandis que moi je restais à côté pour pousser l’oie.

En ce moment-là justement, le moujik bayait aux corneilles ou causait à quelqu’un. Je n’eus même pas la peine de diriger l’oie, qui mit d’elle-même son cou pour prendre l’avoine juste sous la roue. Je fis signe au garçon, il tira, et la tête fut coupée net. Tout le monde nous aperçoit alors, et voilà qu’ils se mettent tous à crier à la fois : « Tu l’as fait exprès. » — « Mais non. » — « Si, c’est exprès. » Puis les voilà qui crient : « Chez le juge de paix ! »