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— Eh ! nous n’avons pas encore l’habitude du régime parlementaire ! observa le major.

— Monsieur Liamchine, ne faites pas tant de bruit, s’il vous plaît, on ne s’entend pas ici, dit le professeur boiteux.

Liamchine quitta brusquement le piano.

— En vérité, Arina Prokhorovna, il n’y a aucun espion aux écoutes, et je ne veux plus jouer ! C’est comme visiteur et non comme pianiste que je suis venu chez vous !

— Messieurs, proposa Virguinsky, — répondez tous verbalement : sommes-nous, oui ou non, en séance ?

— En séance, en séance ! cria-t-on de toutes parts.

— En ce cas, il est inutile de voter, cela suffit. N’est-ce pas votre avis, messieurs ? Faut-il encore procéder à un vote ?

— Non, non, c’est inutile, on a compris !

— Peut-être quelqu’un est-il contre la séance ?

— Non, non, nous la voulons tous !

— Mais qu’est-ce que c’est qu’une séance ? cria un des assistants. Il n’obtint pas de réponse.

— Il faut nommer un président, firent un grand nombre de voix.

— Le maître de la maison, naturellement, le maître de la maison !

Élu par acclamation, Virguinsky prit la parole :

— Messieurs, puisqu’il en est ainsi, je renouvelle ma proposition primitive : si quelqu’un a une communication à faire ou désire traiter un sujet se rapportant plus directement à l’œuvre commune, qu’il commence sans perdre de temps.

Silence général. Tous les regards se portèrent de nouveau sur Stavroguine et Pierre Stépanovitch.

— Verkhovensky, vous n’avez rien à déclarer ? demanda carrément Arina Prokhorovna.

L’interpellé s’étira sur sa chaise.

— Absolument rien, répondit-il en bâillant. — Du reste, je désirerais un verre de cognac.

— Et vous, Stavroguine ?

— Je vous remercie, je ne boirai pas.