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— Eh, diable ! murmura Liamchine avec colère, puis il s’assit devant le piano, et commença à jouer une valse en frappant sur les touches comme s’il eût voulu les briser.

— J’invite ceux qui désirent qu’il y ait séance à lever la main droite, proposa madame Virguinsky.

Les uns firent le mouvement indiqué, les autres s’en abstinrent. Il y en eut qui, ayant levé la main, la baissèrent aussitôt après ; plusieurs qui l’avaient baissée la relevèrent ensuite.

— Oh ! diable ! Je n’ai rien compris ! cria un officier.

— Moi non plus, ajouta un autre.

— Si, moi, je comprends, fit un troisième ; — si c’est _oui, _on lève la main.

— Mais qu’est-ce que signifie _oui ? _

— Cela signifie la séance.

— Non, cela signifie qu’on n’en veut pas.

— J’ai voté la séance, cria le collégien à madame Virguinsky.

— Alors, pourquoi n’avez-vous pas levé la main ?

— Je vous ai regardée tout le temps, vous n’avez pas levé la main, je vous ai imitée.

— Que c’est bête ! C’est moi qui ai fait la proposition, par conséquent je ne pouvais pas lever la main. Messieurs, je propose de recommencer l’épreuve inversement : que ceux qui veulent une séance restent immobiles, et que ceux qui n’en veulent pas lèvent la main droite.

— Qui est-ce qui ne veut pas ? demanda le collégien.

— Vous le faites exprès, n’est-ce pas ? répliqua avec irritation madame Virguinsky.

— Non, permettez, qui est-ce qui veut et qui est-ce qui ne veut pas ? Il faut préciser cela un peu mieux, firent deux ou trois voix.

— Celui qui ne veut pas ne veut pas.

— Eh ! oui, mais qu’est-ce qu’il faut faire si l’on ne veut pas ? Doit-on lever la main ou ne pas la lever ? cria un officier.