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Kiriloff mit sa redingote.

— Oui, c’est pour ma santé, murmura-t-il d’un ton sec ; — asseyez-vous.

— Je ne resterai qu’une minute. Du reste, je vais m’asseoir, reprit Pierre Stépanovitch ; puis, sans transition, il passa à l’objet de sa visite : — C’est bien de soigner sa santé, mais je suis venu vous rappeler notre convention. L’échéance approche « en un certain sens ».

— Quelle convention ?

— Comment, quelle convention ? fit le visiteur inquiet.

— Ce n’est ni une convention, ni un engagement, je ne me suis pas lié, vous vous trompez.

— Écoutez, que comptez-vous donc faire ? demanda en se levant brusquement Pierre Stépanovitch.

— Ma volonté.

— Laquelle ?

— L’ancienne.

— Comment dois-je comprendre vos paroles ? C’est-à-dire que vous êtes toujours dans les mêmes idées ?

— Oui. Seulement il n’y a pas de convention et il n’y en a jamais eu, je ne me suis lié par rien. Maintenant, comme autrefois, je n’entends faire que ma volonté.

Kiriloff donna cette explication d’un ton roide et méprisant.

Pierre Stépanovitch se rassit satisfait.

— Soit, soit, dit-il, — faites votre volonté, du moment que cette volonté n’a pas varié. Vous vous fâchez pour un mot. Vous êtes devenu fort irascible depuis quelque temps. C’est pour cela que j’évitais de venir vous voir. Du reste, j’étais bien sûr que vous ne trahiriez pas.

— Je suis loin de vous aimer, mais vous pouvez être parfaitement tranquille, quoique pourtant je trouve les mots de trahison et de non-trahison tout à fait déplacés dans la circonstance.

— Cependant, répliqua Pierre Stépanovitch de nouveau pris d’inquiétude, — il faudrait préciser pour éviter toute