partirons… Toute cette cérémonie… que je considère, cela va sans dire, avec tout le respect voulu… était…
Le pope s’était déjà dépouillé de ses ornements sacerdotaux, Barbara Pétrovna le retint :
— Je vous prie instamment, batuchka, de rester avec le malade ; on va servir le thé ; parlez-lui, s’il vous plaît, des choses divines pour l’affermir dans la foi.
L’ecclésiastique prit la parole ; tous étaient assis ou debout autour du lit de Stépan Trophimovitch.
— À notre époque de péché, commença le pope en tenant à la main sa tasse de thé, — la foi au Très Haut est l’unique refuge du genre humain dans toutes les épreuves et tribulations de la vie, aussi bien que dans l’espoir du bonheur éternel promis aux justes…
Stépan Trophimovitch parut tout ranimé ; un fin sourire glissa sur ses lèvres.
— Mon père, je vous remercie, et vous êtes bien bon, mais…
— Pas de mais, pas de mais ! s’écria Barbara Pétrovna bondissant de dessus son siège. — Batuchka, dit-elle au pope, — c’est un homme qui… dans une heure il faudra encore le confesser ! Voilà l’homme qu’il est !
Le malade eut un sourire contenu.
— Mes amis, déclara-t-il, — Dieu m’est nécessaire, parce que c’est le seul être qu’on puisse aimer éternellement…
Croyait-il réellement, ou bien l’imposante solennité du sacrement qui venait de lui être administré agissait-elle sur sa nature artistique ? Quoi qu’il en soit, il prononça d’une voix ferme et, dit-on, avec beaucoup de sentiment quelques mots qui étaient la négation formelle de ses anciens principes.
— Mon immortalité est nécessaire, parce que Dieu ne voudrait pas commettre une iniquité, éteindre à tout jamais la flamme de l’amour divin, une fois qu’elle s’est allumée dans mon cœur. Et qu’y a-t-il de plus précieux que l’amour ? L’amour est supérieur à l’existence, l’amour est la couronne de la vie, et comment se pourrait-il que la vie ne lui