Page:Dostoïevski - Les Possédés, Plon, 1886, tome 2.djvu/329

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Non, personne ne dénoncera, dit-il résolument, — mais le groupe doit conserver son organisation et obéir, ou je les… Quelle drogue tout de même que ces gens-là !

II

Il passa d’abord chez lui et, méthodiquement, sans se presser, fit sa malle. Un train express partait le lendemain à six heures du matin. C’était un essai que faisait depuis peu l’administration du chemin de fer, et elle n’organisait encore ce train matinal qu’une fois par semaine. Quoique Pierre Stépanovitch eût dit aux nôtres qu’il allait se rendre pour quelque temps dans le district, tout autres étaient ses intentions, comme l’événement le montra. Ses préparatifs de départ terminés, il régla sa logeuse déjà prévenue par lui, prit un fiacre et se fit conduire chez Erkel qui demeurait dans le voisinage de la gare. Ensuite, vers une heure du matin, il alla chez Kiriloff, dans le domicile de qui il s’introduisit de la même façon clandestine que lors de sa précédente visite.

Pierre Stépanovitch était de très mauvaise humeur. Sans parler d’autres contrariétés qui lui étaient extrêmement sensibles (il n’avait encore rien pu apprendre concernant Stavroguine), dans le courant de la journée, paraît-il — car je ne puis rien affirmer positivement — il avait été secrètement avisé qu’un danger prochain le menaçait. (D’où avait-il reçu cette communication ? Il est probable que c’était de Pétersbourg.) Aujourd’hui sans doute il circule dans notre ville une foule de légendes au sujet de ce temps-là ; mais si quelqu’un possède des données certaines, ce ne peut être que l’autorité judiciaire. Mon opinion personnelle est que Pierre Stépanovitch pouvait avoir entrepris quelque chose ailleurs encore que chez nous, et que, par suite, des avertissements ont pu