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et désormais vous ne faites plus partie de la société. J’ai été positivement chargé de vous l’apprendre.

— Qui vous a chargé de cela ?

— Ceux qui m’ont révélé le signe de reconnaissance.

— Vous arrivez de l’étranger ?

— Cela… cela, je crois, doit vous être indifférent.

— Eh ! diable ! Mais pourquoi n’êtes-vous pas venu plus tôt, si l’on vous a donné cet ordre ?

— Je me conformais à certaines instructions et je n’étais pas seul.

— Je comprends, je comprends que vous n’étiez pas seul. Eh… diable ! Mais pourquoi Lipoutine n’est-il pas venu lui-même ?

— Ainsi, je viendrai vous prendre demain à six heures précises du soir, et nous irons là à pied. Il n’y aura que nous trois.

— Verkhovensky y sera ?

— Non, il n’y sera pas. Verkhovensky part d’ici demain à onze heures du matin.

— Je m’en doutais, fit Chatoff d’une voix sourde et irritée ; — il s’est sauvé, le misérable ! ajouta-t-il en frappant du poing sur sa cuisse.

Des pensées tumultueuses l’agitaient. Erkel le regardait fixement et attendait sa réponse en silence.

— Comment donc ferez-vous ? Une presse n’est pas un objet si facile à emporter.

— Il ne sera pas nécessaire de la prendre. Vous nous indiquerez seulement l’endroit, et nous nous bornerons à nous assurer qu’elle s’y trouve en effet. Nous savons où elle est enterrée, sans connaître exactement la place. Vous ne l’avez révélée à personne encore ?

Les yeux de Chatoff se fixèrent sur l’enseigne.

— Comment un blanc-bec comme vous s’est-il aussi fourré là dedans ? Eh ! mais il leur en faut aussi de pareils ? Allons, retirez-vous ! E-eh ! Ce coquin-là vous a tous trompés et a pris la fuite.