— Chatoff ne doit pas savoir que nous sommes ici, murmura d’un ton sévère Pierre Stépanovitch à l’oreille de Lipoutine.
III
Comme toujours à cette heure-là, Kiriloff était assis sur son divan de cuir et buvait du thé à l’arrivée des visiteurs, il ne se leva point, mais il eut une sorte de tressaillement et regarda d’un air effaré ceux qui entraient chez lui.
— Vous ne vous êtes pas trompé, dit Pierre Stépanovitch, — c’est pour cela même que je viens.
— Aujourd’hui ?
— Non, non, demain… vers cette heure-ci.
Et il se hâta de s’asseoir près de la table tout en observant avec une certaine inquiétude Kiriloff, dont le trouble ne lui avait pas échappé. Du reste, l’ingénieur ne tarda pas à se remettre et à reprendre sa physionomie accoutumée.
— Voyez-vous, ils ne veulent pas le croire. Vous n’êtes pas fâché que j’aie amené Lipoutine ?
— Aujourd’hui je ne me fâcherai pas, mais demain je veux être seul.
— Mais auparavant il faut que j’aille chez vous, par conséquent je serai là.
— J’aimerais mieux me passer de votre présence.
— Vous vous rappelez que vous avez promis d’écrire et de signer tout ce que je vous dicterais.
— Cela m’est égal. Et maintenant serez-vous longtemps ?
— J’ai à voir quelqu’un avec qui je dois passer une demi-heure ; ainsi, faites comme vous voudrez, je resterai une demi-heure.
Kiriloff ne répondit pas. Pendant ce temps, Lipoutine s’était assis un peu à l’écart, au-dessous du portrait de l’é